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Полное собрание сочинений. Том 12. Произведения 1852-1857 годов

parmi quelques misérables espions que le gouvernement russe paie

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pour être au courant de tous les cancans. Les véritables Chenu et Delahodde du tzar sont les oints du seigneur, leurs annates et cognates, leur parenté dans les lignes ascendantes ot descendantes. Le registre des espions russes, le plus complet, c’est ¡’Almanach de Gotha.

Vous voyez donc qu’une lutte sérieuse avec la Russie est totalement impossible avant d’avoir balayé, et bien balayé, la maison.

Il y a une solidarité fatale qui lie l’Europe réactionnaire au tzarisme; et ce sera une sublime ironie providentielle si nous la voyons périr par lui.

Nicolas a fait la plus grande espièglerie du XlX-e siècle en déclarant la guerre à la Turquie.

Ce sont les conservateurs, les amis, les clients de Nicolas qui crient le plus haut maintenant contre lui. Ils prenaient le tzar pour un sergent de ville, et étaient très contents de faire peur aux révolutionnaires des 400 000 baïonnettes russes; ils croyaient qu’il se résignerait au rôle passif d’épouvantail; ils avaient oublié que même un Louis Bonaparte n’a pas voulu se résigner à la fonction du «sapeur pompier…»

Les jours heureux étaient revenus, on était si content, si tranquille; les masses, écrasées par les troupes, mouraient de faim avec une résignation chrétienne. Pas de presse, pas de tribune… pas de France! Le Saint-Père, appuyé sur une armée sortie de la rue de Jérusalem, distribuait à droite et à gauche sa bénédiction apostolique. Les affaires reprenaient après la catastrophe de Février. L’anthropophagie sociale était plus stationnaire que jamais. Une ère «d’amour et de sympathie» s’ouvrait. La Belgique se mariait à L’Autriche dans la personne d’une archiduchesse autrichienne, — le jeune empereur de Vienne soupirait aux pieds de sa fiancée, Napoléon III — «Werther» de 45 ans — épousait par caprice amoureux sa «Charlotte» de Téba.

Au milieu de cette tranquillité, de ce bien-être universel, l’empereur Nicolas jette l’alarme en commençant une guerre unitile, fantastique, religieuse, une guerre qui peut très bien passer des bords de la mer Noire aux bords du Rhin, et qui apportera dans tous les cas tout ce qu’on craignait des révolutions: — expropriations, contributions, violences, et, par dessus le marché,

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une occupation étrangère, des cours martiales, des fusillades et des contributions de guerre.

Donoso Contès, dans un discours célèbre prononcé à Madrid en 1849, prédisait l’invasion russe et ne trouvait d’autre ancre de salut pour la Civilisation que l’Unité de l’autorité. C’est-à-dire la monarchie absolue au service du catholicisme. C’est pour cela aussi qu’il demandait pour première condition l’introduction du catholicisme en Angleterre.

Il est possible qu’avec une Unité pareille, l’Europe serait très forte; mais cette unité est totalement impossible, aussi impossible que toute autre, à l’exception de l’Unité révolutionnaire.

Si on ne craignait pas la Révolution plus encore que les Russes, quoi de plus simple que d’aller à Sébastopol, d’occuper Odessa. La population mahométane de la Crimée ne serait pas hostile aux Turcs. Une fois là, on ferait un appel à la Pologne, on déclarerait la liberté des paysans de la Petite Russie qui abhorrent le servage… Nous verrions ce qu’entreprendrait alors Nicolas, aveç son Dieu orthodoxe.

Mais, dira l’Autriche — la Pologne c’est la Gallicie.

Mais, dira la Prusse — la Pologne c’est la Posnanie.

Et une fois la Pologne debout — quelle force retiendra la Hongrie, la Lombardie?

Eh bien, il ne faut pas aller à Sébastopol, — ou faire une guerre d’apparat qui se terminera au profit de Nicolas ou de Louis Bonaparte. C’est-à-dire, dans les deux cas, au profit du despotisme et contre les conservateurs.

Car le despotisme n’est pas du tout conservateur. Il ne l’est pas même en Russie. Le despotisme, c’est ce qu’il y a de plus corrosif, de plus délétère, de plus dissolvant. Quelquefois les peuples jeunes, cherchant à s’organiser, commencent par le despotisme, le traversent, s’en servent comme d’une dure éducation; mais plus souvent se sont les peuples retombés en enfance qui succombent sous le joug du despotisme.

Le despotisme militaire, algérien ou caucasien, bonapartiste ou cosaque, une fois maître de l’Europe, sera nécessairement entraîné à une lutte acharnée contre la vieille société; il ne pourra laisser exister les institutions semi-libres, les droits semi-indépendants,

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la civilisation habituée à la parole, la science habituée à l’analyse, l’industrie s’érigeant on puissance.

Le despotisme, c’est la barbarie, c’est l’enterrement d’une civilisation décrépite — et quelquefois l’étable dans laquelle naît le sauveur.

Le monde européen, tel qu’il est, a fini sa tâche; mais il nous semble qu’il pourrait finir plus honorablement sa carrière — passer à une autre forme d’existence, non sans secousses, mais sans abaissement, sans dégradation. Les conservateurs, comme tous les avares, ont eu surtout peur de l’héritier; eh bien! le vieillard sera étranglé nuitamment par des voleurs et des brigands.

Après avoir bombardé Paris, fusillé, déporté, emprisonné les ouvriers, — ont pensa que le danger était passé! — Mais la mort est un Prothée. On la chasse comme ange de l’avenir, — elle revient comme spectre du passé, — on la chasse comme République démocratique et sociale, elle revient comme Nicolas, tzar de toutes les Russies, ou comme Napoléon, tzar de France.

L’un et l’autre — ou les deux ensemble, achèveront la lutte.

Pour lutter, il faut que son adversaire ne soit pas encore terrassé. Où est donc le dernier champ- clos, le dernier retranchement où la civilisation peut livrer une bataille, se défendre au moins contre les despotes?

A Paris? — Non.

Paris, comme Charles-Quint, a abdiqué, de son vivant, sa couronne révolutionnaire, — un peu de gloire militaire et beaucoup de police suffiront pour maintenir l’ordre à Paris.

Le champ-clos est à Londres.

Tant qu’une Angleterre libre et fière de ses droits existe, — rien n’est fait définitivement pour la cause de la barbarie.

Depuis le Dix Décembre 1848, la Russie et l’Autriche n’ont plus de haine contre Paris. Paris a perdu son prestige pour les rois, ils ne le craignent plus. — Toute leur haine s’est portée contre l’Angleterre. Ils l’abhorrent, ils la détestent et ils voudraient… la piller!

Il y a en Europe des pays réactionnaires, mais non des pays conservateurs. L’Angleterre seule est conservatrice, et le pourquoi est tout clair, elle a quelque chose à conserver — la liberté individuelle.

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Mais ce seul mot résume tout ce qui est poursuivi, haï par les Bonaparte et les Nicolas.

Et vous pensez qu’ils laisseront, eux vainqueurs, à 12 heures de distance de Paris esclave, — Londres libre, Londres foyer do Ja propagande et port ouvert à tout ce qui fuira les villes désertes et incendiées du continent? Car tout ce qui doit être sauvé et peut l’être — au milieu de l’orgie de la destruction, — sciences et arts, industrie et culture — tout cela sera nécessairement poussé en Angleterre.

Cela suffit pour une guerre.

Enfin le rêve du premier barbare moderne, de Napoléon, se réalisera.

Quel plus grand malheur peut attendre l’Angleterre d’une Europe révolutionnaire que du despotisme européen? Les peuples ont assez à faire chez eux pour ne pas penser à des invasions.

Ce n’est ni l’égoïsme, ni la cupidité qui empêchent les Anglais de voir cela clairement. Disons le franchement, c’est leur ignorance et la maudite routine des affaires qui rend ces hommes incapables de comprendre qu’on doit quelquefois marcher non par des chemins battus, mais en se frayant une nouvelle route.

Eh bien, ceux qui ont des yeux et no veulent pas les ouvrir, ceux-là sont dévoués aux dieux infernaux. Comment les sauver?

Uno nuit profonde et silencieuse couvrira le travail de la décomposition…

Et après?.. Après la nuit vient le jour!

Il est juste de verser des larmes sur les malheurs qui s’accomplissent… mais laissons les morts enterrer leurs morts — et, tirant avec pitié et recueillement le drap mortuaire sur l’agonisant, ayons le courage de répéter le vieux cri:

Le roi est mort — Vive le roi!..

Londres, le 17 février 1854.

TROISIEME LETTUE

Cher Linton,

Le monde Slave est beaucoup plus jeune que l’Europe.

Il est plus jeune politiquement parlant, comme l’Australie est plus jeune géologiquement. Il s’est organisé plus lentement,

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il ne s’est pas développé, il est plus récent et ne fait qu’entrer dans le grand courant de l’histoire.

Le nombre connu des siècles d’existence n’y fait rien. L’enfance des peuples peut durer des milliers d’années, aussi bien que leur vieillesse. Les peuples Slaves en fournissent un exemple, et ceux de l’Asie — un autre.

Mais sur quoi peut ont baser l’affirmation que l’état actuel des Slaves est la jeunesse et non la décrépitude, que c’est le commencement et non l’incapacité du développement? Ne voyons-nous pas des peuples qui disparaissent sans avoir eu une histoire, et même des peuples qui avaient fait preuve de quelques facultés, comme les Finnois?

Il suffit de regarder l’existence de la Russie pour ne conserver aucun doute sur ce sujet. L’influence terrible qu’elle exerce sur l’Europe n’est pas un signe de marasme ni d’incapacité, mais bien d’une force demi-sauvage, d’une jeunesse non réglée, mais vigoureuse.

C’est avec ce caractère qu’elle a apparu pour la première fois dans le monde civilisé.

Dans ce temps-là, il y avait la régence à Paris et quelque chose de pire en Allemagne. Partout la dissolution, la mollesse, la débauche la plus énervante, la plus dégradée, vulgaire en Allemagne, raffinée à Paris.

Dans cette atmosphère malsaine où les parfums cachent à peine les miasmes, — dans ce monde de petites maîtresses, de filles illégitimes, de courtisanes gouvernant les Etats, de nerfs effaiblis, de princes crétins — vous respirez enfin en rencontrant la taille colossale de Pierre I, de ce barbare en simple uniforme de gros drap, de cet homme du Nord, robuste, musculeux, plein d’énergie et de force. C’était le premier Russe qui prenait ainsi sa place au milieu de souverains de l’Europe. Il venait

pour apprendre, — mais il apprit beaucoup de choses auxquelles il ne s’attendait pas. Il comprit trop bien la vieillesse des Etats de l’Occident et la dégénérescence des gouvernants.

Alors on

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