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Полное собрание сочинений. Том 33. Дополнения к изданию. Публичные чтения Г. Грановского

Alors j’étais dans toute la force du développement, la vie m’avait donné des otages, je me pressai de quitter un petit groupe d’hommes intimément soudés par la vie, par un amour commun, et par le même malheur… Le lointain m’entraînait au large, par la lutte ouverte, par la parole libre — j’avais soif d’une arène indépendante, je voulais essayer mes forces sans entraves.

Maintenant… je n’attends rien, je suis prêt à tout… au moins rien ne m’étonnera… la [jouissance] joie [est] sera bridée par

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des souvenirs du passé, par la crainte de l’avenir. Je ne désire ni de mourir demain, ni de vivre longtemps. La fin doit arriver par un hasard inintelligent comme la naissance.

Et pourtant j’ai trouvé ce que je cherchai… même eine Anerkennung… et à côté de cela la perte de toutes les croyances, de tous les biens — des trahisons… des lâchetés… l’amitié qui mêle avec un

sourire et une larme du poison dans le verre… le dévouement qui vole l’argent avec fierté et la tête haute… et en général une dissolution de laquelle vous n’avez pas d’idée.

C’est difficile, très difficile pour moi de commencer cette partie de mon récit… C’est en me retirant devant cette tâche que j’ai écrit les trois autres volumes — mais enfin nous sommes face-à-face.

Pas de faiblesse. Celui qui a pu survivre, doit avoir le courage de se souvenir.

Depuis la moitié de l’année 48 je n’ai à raconter qu’une série d’épreuves poignantes, des coups non mérités, des offenses non vengées. Il n’y a que de tristes images ou des faces hideuses dans la tête… [et] des crimes… des lâchetés, des fautes… des fautes à moi, des fautes [des] aux autres, des fautes commises par des peuples entiers.

Là où il y avait des possibilité de réconciliation, de salut, de triomphe — la mort traversa le chemin.

…Par les dernières journées de notre [existence] séjour [vie] à Rome s’est close la partie sereine de [ma] souvenirs qui commencent par le serment enfantin sur la Montagne des moineaux.

C’est vrai qu’avant [l’Italie] Rome, Paris de 1847 me fit tressaillir et me remplit de douleur… mais j’étais bientôt complètement entraîné par les événements qui bouillonaient autour de moi, dans le cadre magnifique de l’Italie. J’ai vu la révolution sous les pieds de Vésuve, je l’ai vue devant le Vatican, j’ai vu le roi de Naples muselé par le peuple, et le Pape allant humblement demander l’aumone de l’amour populaire… [et j’ai entendu] et derechef je croyai passionnément… c’était une ivresse, une fièvre… un ouragan emportait tout, levait tout… toute l’Europe [tous les peuples] se levait, était debout, marchait — je m’élançais aussi dans le tourbillon… et lorsque je commençai à revenir à moi — tout avait disparu… tout a péri — la Somnambula effrayée par la police était tombée de son toit — car c’était un accès de lunatisme et non un réveil… les amis se dispersèrent, on s’achevait les uns les autres et quelques jours de plus, j’étais tout seul — entre des cercueils et des berceaux — gardien, défenseur, vengeur, je ne sais quoi — et sans avoir ni force, ni savoir pour faire quelque chose — parce que je voulais faire plus qu’on ne fait communément.

Et tout cela a été… tout cela a passé — c’est incroyable.

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Et je suis à Londres — dans [les brouillards] [entouré d’une race qui m’est étrangère… Quelle confusion. La lourde haleine de l’Océan est belle pour moi, elle est à sa place. Les formes se fondent, le feu ne fait que des taches… et ce monde, quelque chose de vivant, se meut, grouille. C’est un monde] un crépuscule éternel entouré d’une race qui m’est étrangère, plongé dans la lourde haleine de l’Océan — où les formes se fondent, où le feu ne fait que des taches — et où au fond un monde entier grouille et s’agite… un monde qui s’en va en chaos… ou qui en ressort… avance tout, mais [alors] pas pour nous…

Et loin de l’autre côté du cimetière… cette ligne lumineuse — et là — le pays innondé de lumière, baigné par une mer bleue, sous un ciel bleu.

O Rome, comme j’aime à retourner à toi, comme j’aime avec avarice et luxure repasser jour par jour, heure par heure [de] mon ivresse par toi [et à toi].

Nuit close. La Via del Corso couverte de peuple… Ça et là des torches… Il y a déjà un mois que la république est proclamée à Paris, des nouvelles sont arrivées de Milan, on se bat. Le peuple romain veut la guerre… on dit que Charles Albert va avec ses troupes contre l’Autriche… Et le parler de la foule mécontente ressemble au mugissement intermittent de la vague qui s’approche… de la vague qui s’éloigne… Le peuple se masse en colonne «sento la polvere» et [va] en avant chez l’ambassadeur du Piémont — s’informer si c’est vrai que la guerre est déclarée.

— Dans les rangs, dans les rangs… si vous êtes avec nous… — nous crie-t-on de dix côtés.

— Nous sommes des étrangers.

— [Corpo] Dio Santo! Tant mieux, vous êtes nos hôtes.

Et nous entrâmes dans les colonnes.

— Les étrangers en avant! Les hôtes en avant! et surtout les dames, le donne forestiere — et la mer du peuple se sépare en deux avec un trépignement de joie. Cicerovachio, et avec lui un jeune Romain pâle et maladif, un poète, traverse les rangs avec le drapeau, ils viennent serrer nos mains… «Les dames sous le drapeau», — crie le peuple, et le tribun, il popolano, se met en avant… et les [serpent de] dix à quinze mille hommes se meuvent tout il Corso depuis la P del Popolo jusqu’au forum de Trajan, est un [seul lézard] saurien immense serpentant par la ville éternelle — avec cette grâce majestueuse qui n’appartient qu’aux Romains — et qui est également éloignée de la marche soldatesque des Français et de cohue informe des Anglais.

Les premiers rangs entrèrent au Palais de l’ambassade [et sortirent] après quelques instants les portes du balcon s’ouvrirent… L’ambassadeur sortit et affirma la nouvelle — ses paroles ont été accueillies avec un trépignement d’enthousiasme.

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C se tenait sur le balcon fortement éclairé par des torches et des candélabres, et à côté de lui, couvert du drapeau de l’Italie, quatre jeunes femmes — toutes quatre des Russes, n’est-ce pas étrange? Je les vois comme si c’était hier sur cette tribune en pierre [taillée] ressortissante d’un Palazzo ancien et grave et en bas le peuple ondoyant et agité, qui mêlait aux cris de guerre et de menace parfois… son Evviva le donne forestieri!.. Evviva le sorelle forestieri!..

En Angleterre [nous] elles seraient sifflées et outragées, en France on les aurait pris pour des agents russes. Mais ici l’aristocratique prolétaire, le descendant de Marius et des anciens tribuns — nous salua avec sincérité et bienveillance.

Nous étions adoptés par lui dans la lutte européenne. Et ce n’est qu’avec l’Italie que le lien d’amour ne s’est pas brisé — au moins le souvenir du cœur reste immaculé.

[Comme tout cela paraît incroyable maintenant…] Quel rêve étrange… Mais je n’envie pas [ceux] les sages qui [n’]étaient [pas entraînés] à jeun alors, qui [n’étaient pas ivres] ne s’endormirent pas le sourire à la bouche. Bientôt il fallait nolens volens se réveiller [d’être à jeun, le jour blafard et froid arrivait et] l’implacable Macbeth de la vie réelle leva déjà la main pour tuer le sommeil.

My dream was past… it has no further change…

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НАДПИСЬ НА АВТОРСКОМ ПЕРЕВОДЕ ОТРЫВКА ИЗ «БЫЛОГО И ДУМ»

QUATRIEME PARTIE

Je dépose les feuilles traduites le 2 février 1856 — juste 9 ans après le départ de Moscou — comme une petite et pâle couronne d’immortelles à côté des fleurs qui ornent notre défunte — je les dédie à Malvida, un jour après qu’elle a perdu son amie — Anna.

A. Her zen.

2 fév. Londres.

ПЕРЕВОД

Я кладу эти странички, переведенные 2 февраля 1856 года, — ровно через 9 лет после отъезда из Москвы — как скромный и бледный венок из иммортелей рядом с цветами, украшающими нашу покойницу, — я посвящаю их Мальвиде, через день после утраты ею подруги ее Анны.

А. Герцен

2 фев<раля>. Лондон.

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L’ARISTOCRATIE RUSSE

…Le général en chef n’était autre que notre vieille connaissance, le prince , le prince qui avait pris la petite

Française, au temps où le peuple de Paris prenait la grande Bastille. Il avait fait une carrière brillante et s’en revint après la campagne de 1815, décoré de croix de tous les souverains allemands, restaurés par les cosaques, et inondé de la voie lactée des étoiles russes. Il était couvert de blessures et criblé de dettes. Il voyait peu clair et ne se tenait pas tout à fait ferme sur ses jambes, il n’entendait pas avec toute la précision désirable, mais il peignait toujours avec un certainfion ses cheveux blancs, à la Titus, serrait son uniforme à la taille, teignait ses moustaches, s’arrosait d’odeur, faisait la cour aux jeunes personnes et entretenait, Dieu sait pourquoi, si ce n’est

par pure convenance, une chanteuse française moins attrayante par les charmes de la voix que par les contours de son sein à l’antique.

Il m’intéressait beaucoup, mon vieux prince. Il appartenait à un type qui se perd, que j’ai beaucoup connu dans ma jeunesse, et qu’il faut nécessairement stéréotyper avant qu’il s’efface pour toujours. Il appartenait au type du général russe de 1812, de l’officier supérieur du temps de l’empereur Alexandre.

Il faut nous rappeler que la société russe a changé de peau au moins quatre fois depuis Pierre Ier. On a beaucoup parlé, beaucoup écrit au sujet des hommes du temps de Pierre Ier et les vieillards du temps de Catherine II, mais les officiers du temps d’Alexandre sont comme oubliés. Est-ce parce qu’ils sont trop près de nous, ou

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