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Полное собрание сочинений. Том 7. О развитии революционных идей в Росси. Произведения 1851 — 1852 годов

d’idées pendant les dernières vingt-cinq années. Elles mettaient les habitants des gouvernements d’Omsk et de Tobolsk dans la possibilité de lire les romans de Dickens ou de George Sand, deux mois après leur

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apparition à Londres ou à Paris. Leur périodicité même avait, l’avantage de réveiller les lecteurs paresseux.

Polévoï a trouvé le moyen de continuer le Télégraphe jusqu’en 1834. Et pourtant la persécution de la pensée redoubla après la révolution de Pologne. L’absolutisme vainqueur perdit toute fausse honte, toute pudeur. On punissait les espiègleries d’écoliers comme des révoltes à main armée, on exilait des enfants de 15 à 16 ans, on les faisait soldats à vie. Un étudiant de l’Université de Moscou, Poléjaïeff, déjà connu par ses poésies, fit quelques vers libéraux. Nicolas, sans le faire juger, le fit venir chez lui, lui ordonna de lire ses vers à haute voix, l’embrassa et l’envoya comme simple soldat dans un régiment, peine absurde qui ne pouvait surgir que dans l’esprit d’un gouvernement insensé qui prend l’armée russe pour une maison de correction ou pour un bagne. Huit ans après, le soldat Poléjaïeff mourut à l’hôpital militaire. Un an plus tard, les frères Kritzki, également étudiants de Moscou, allaient aux colonies disciplinaires pour avoir, si je ne me trompe pas, cassé le buste de l’empereur. Depuis, personne n’a entendu parler d’eux. En 1832, sous le prétexte d’une société secrète, on arrêtait une douzaine d’étudiants qu’on envoyait ensuite aux garnisons

d’Orenbourg où on leur adjoignait le fils d’un ministre luthérien, Jules Kolreif, qui n’a jamais été sujet russe, qui ne s’est jamais occupé que de musique, mais qui avait osé dire qu’il ne voyait pas de devoir à dénoncer ses amis. En 1834, on nous jeta, mes amis et moi, dans les prisons, et, après huit mois, on nous exila en qualité de scribes aux chancelleries des provinces éloignées. On nous accusait de l’intention de former une société secrète et de vouloir faire de la propagande saint-simonien- ne; on nous lut, par forme de mauvaise plaisanterie, la sentence de mort et l’on nous annonça que l’empereur, avec la bonté impardonnable qui le caractérise, n’avait ordonné contre nous qu’une peine correctionnelle — l’exil. Cette punition a duré plus de cinq ans.

Le Télégraphe fut suspendu le même an 1834. Polévoï, en perdant son journal, se trouva dérouté. Ses essais littéraires ne marchèrent plus; aigri et désappointé, il quitta Moscou pour aller vivre à Pétersbourg. Un étonnement douloureux accueillit les premiers numéros de sa nouvelle revue (Le Fils de la Patrie).

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Il devint soumis, flatteur. C’était triste de voir ce lutteur audacieux, cet ouvrier infatigable, qui avait su traverser les temps les plus difficiles, sans déserter son poste, transiger avec ses ennemis, dès qu’on eut suspendu sa revue. C’était triste d’entendre le nom de Polévoï accouplé aux noms de Gretch et de Boulgarine, triste aussi d’assister à la représentation de ses pièces dramatiques applaudies par les agents secrets et les laquais officiels.

Polévoï sentait sa chute, il en souffrait, il devint abattu. Il voulait même sortir de sa fausse position, se justifier, mais il Q’en avait pas la force et il se compromettait ainsi auprès du gouvernement sans rien gagner vis-à-vis du public. Sa nature plus noble que sa conduite ne pouvait supporter longtemps cette lutte. Il mourut bientôt, laissant ses affaires dans un désarroi complet. Toutes ses concessions ne lui ont rien apporté.

Il y eut deux continuateurs de l’œuvre de Polévoï, Sénkofski et Bélinnski.

Sénkofski, Polonais russifié, orientaliste et académicien, a été un écrivain plein d’esprit, grand travailleur, sans aucune opinion, à moins d’appeler opinion un profond mépris des hommes et des choses, des convictions et des théories. Sénkofski fut le véritable représentant du pli que l’esprit public avait pris depuis 1825, un vernis brillant mais glacé, un sourire de dédain qui cachait souvent un remords, une soif de jouissance aiguillonnée par l’incertitude qui planait sur le sort de chaque homme, un matérialisme moqueur et pourtant triste, des plaisanteries gênées d’homme en prison.

Bélinnski fut l’antithèse de Sénkofski, c’était un type de la jeunesse studieuse de Moscou, martyr de ses doutes et de ses pensées, enthousiaste, poète dans la dialectique, froissé par tout ce qui l’entourait, il se consumait en tourments. Cet homme palpitait d’indignation et frémissait de rage au spectacle éternel de l’absolutisme russe.

Sénkofski fonda sa revue comme on fonde une entreprise commerciale. Nous ne partageons pa s cependant l’avis de ceux qui voyaient en elle une tendance gouvernementale. Elle fut lue avec avidité dans toute la Russie, ce qui n’est ‘jamais arrivé à un journal ou à un livre écrit dans les intérêts du pouvoir.L’Abeille du Nord protégée par la police, n’a fait une exception à cette règle qu’en apparence, c’était la seule feuille politique et non officielle qui fût tolérée, ce qui explique sa vogue; mais dès que les journaux officiels ont eu une rédaction supportable, l’Abeille du Nord a été délaissée par ses lecteurs. Il n’y a pas de gloire, de réputation qui ait pu supporter le contact mortel et avilissant du gouvernement. Tous ceux qui lisent en Russie détestent le pouvoir; tous ceux qui l’aiment ne lisent pas ou ne lisent que des futilités françaises. Pouchkine, la plus grande illustration russe a été délaissé quelque temps pour un compliment qu’il a fail à Nicolas, après le choléra, et pour deux poésies politiques. Gogol, l’idole des lecteurs russes, tomba tout à coup dans le plus profond mépris pour une brochure servile. Polévoï s’éclipsa le jour où il fit alliance avec le gouvernement. On ne pardonne pas en Russie à un renégat.

Sénkofski parlait avec mépris du libéralisme et de la science, mais en revanche, il n’avait de respect pour rien. Il s’imaginait être éminemment pratique, parce qu’il prêchait un matérialisme théorique, et, comme tous les théoriciens, il a été dépassé par d’autres théoriciens beaucoup plus abstraits, mais qui avaient des convictions ardentes, ce qui est infiniment plus pratique et plus près de l’action que la practologie.

Ridiculisant tout ce qu’il y a de plus sacré pour l’homme, Sénkofski, sans le vouloir, détruisait dans les esprits le monarchisme. Prêchant le confort, les joies sensuelles, il amenait les hommes à la pensée très simple qu’il est impossible de jouir en pensant continuellement aux gendarmes, aux dénonciations et à la Sibérie, que la peur n’est pas confortable, et qu’il n’y a pas d’homme qui puisse bien dîner s’il ne sait pas où il couchera.

Sénkofski était de son temps; en balayant à l’entrée d’une nouvelle époque, il mêlait des objets de valeur avec la poussière, mais il déblayait le terrain pour un autre temps qu’il ne comprenait pas. Il le sentait lui-même, et, dès que quelque chose de nouveau et d’énergique eut percé dans la littérature, Sénkofski plia ses voiles, et s’effaça bientôt complètement.

Sénkofski avait été entouré d’un cercle de jeunes littérateurs qu’il perdait en corrompant leur goût. Ils introduisirent un genre qui paraissait brillant à la première vue et frelaté à la seconde. Poésie de Pétersbourg, ou mieux encore de Vassileiostrov10[10],

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il n’y avait rien de vivant, de réel dans les images hyst’riques qu’évoquaient les Koukolnik, les Bénédiktoff, les Timoféïeîf etc. De pareilles fleurs ne pouvaient s’épanouir qu’aux pieds du trône impérial et à l’ombre de la forteresse de Pierre et Paul.

A Moscou, la revue qui remplaça le Télégraphe supprimé fut le Télescope ; cette revue n’a pas eu autant de longévité que celle qui l’avait précédée, mais sa mort fut des plus glorieuses. Ce fut

elle qui inséra la célèbre lettre deT chaadaïeff. La revue fut immédiatement supprimée, le censeur mis à la retraite, le rédacteur en chef exilé a Oust-Syssolsk. La publication de cette lettre fut un événement des plus graves. Ce fut un défi, un signe de réveil; elle rompit la glace après le 14 décembre. Enfin, il vint un homme dont l’âme débordait d’amertume; il trouva une langue terrible pour dire avec une éloquence funèbre, avec un «aime accablant tout ce qui s’était accumulé d’acerbe, en dix années, dans le cœur du Russe civilisé. Cette lettre fut le testament d’un homme qui abdique ses droits, non par amour pour ses héritiers, mais par dégoût; sévère et froid, l’auteur demande compte à la Russie de toutes les souffrances dont elle abreuve un homme qui ose sortir de l’état de brute. Il veut savoir ce que nous achetons à ce prix, par quoi nous avons mérité cette situation; il l’analyse avec une profondeur désespérante, inexorable, et après avoir terminé cette vivisection, il se détourne avec horreur, en maudissant le pays dans son passé, dans son présent et dans son avenir. Oui, cette sombre voix ne se fit entendre que pour dire à la Russie qu’elle n’a jamais existé humainement, qu’elle ne représente .«qu’une lacune de l’intelligence humaine, qu’un exemple instructif pour l’Europe». Il dit à la Russie que son passé a été mutile, que son présent est superflu et qu’elle n’a aucun avenir.

Sans être d’accord avec Tchaadaïeff, nous comprenons parfaitement la voie qui l’a conduit à ce point de vue noir et désespéré; d autant plus, que jusqu’à présent les faits parlent pour lui et non contre lui. Nous croyons; et lui, il n’a qu’a montrer du doigt; uous espérons, et il lui suffit d’ouvrir un journal pour prouver qu’il raison. La conclusion à laquelle arrive Tchaadaïeff ne peut

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soutenir aucune critique, et ce n’est point là qu’il faut chercher l’importance de cette publication; c’est par le lyrisme de son indignation austère qui secoue l’âme et la laisse longtemps sous une impression pénible, qu’elle conserve sa signification. On a reproché à l’auteur sa dureté, mais c’est elle qui fait son plus grand mérite. On ne doit pas nous ménager; nous oublions trop vite notre position, nous sommes trop habitués à nous distraire entre

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d'idées pendant les dernières vingt-cinq années. Elles mettaient les habitants des gouvernements d'Omsk et de Tobolsk dans la possibilité de lire les romans de Dickens ou de George Sand, deux