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Полное собрание сочинений в 90 томах. Том 59. Письма, 1844-1855 гг.

je sais que vous seriez contente de moi. Quand j’agis mal ce que je crains le plus c’est de vous faire du chagrin. — Votre amour est tout pour moi et vous demandez à Dieu qu’il nous sépare! Je ne puis vous dire le sentiment que j’ai pour vous, la parole ne suffit pas pour vous l’exprimer et je crains que vous ne pensiez que j’exagère et cependant je pleure à chaudes larmes en vous écrivant. — C’est à cette pénible séparation, que je dois de savoir quelle amie j’ai en vous et combien je vous aime. —

Mais est-ce que je suis le seul à avoir ces sentiments pour vous et vous demandez à Dieu de mourir. — Vous dites que vous êtes isolée; quoique je sois séparé de vous, mais si vous croyez à mon amour cette idée aurait pu faire contrepoids à votre douleur; pour moi je ne me sentirai isolé nulle part, jusqu’à ce que [je] me saurais aimé par vous comme je le suis. —

Je sens cependant que c’est un mauvais sentiment qui me dicte mes paroles — je suis jaloux de votre chagrin. — Aujourd’hui il m’est arrivé une de ces choses, qui m’auraient fait croire en Dieu, si je n’y croyais déjà fermement depuis quelque tems.

L’été à Старый Юртъ touts les officiers qui y étaient ne faisaient que jouer et assez gros jeu. — Comme en vivant au camp il est impossible de ne pas se voir souvent j’ai très souvent assisté au jeu et malgré les instances qu’on me faisait, j’ai tenu bon pendant un mois; mais un beau jour en plaisantant j’ai mis un petit enjeu, j’ai perdu, j’ai recomencé j’ai encore perdu, la chance m’était mauvaise, la passion du jeu s’est réveillé et en deux jours j’ai perdu tout ce que j’avais d’argent et celui que N[icol]as m’a donné (à peu près 250 r arg) et pardessus cela encore 500 r. arg. pour lesquels j’ai donné une lettre de change payable au mois de Janvier 1852.2 — Il faut vous dire que près du camp il y a un аулъ où habitent les Чеченцы. — Un jeune garçon (Чeченецъ) Садо,3 venait au camp et jouait; mais comme il ne savait pas compter et inscrire il y avait des ch[e]napans d’officiers, qui le trichaient. Je n’ai jamais voulu jouer pour cette raison, contre Sado et même je lui ai dit qu’il ne fallait pas qu’il joue parcequ’on le trompe et je me suis proposé de jouer pour lui par procuration. — Il m’a été très reconnaissant pour ceci et m’a fait cadeau d’une bourse; comme c’est l’usage de cette nation de se faire des cadeaux mutuels je lui ai donné un misérable fusil que j’avais acheté pour 8 r. Il faut vous dire, que pour devenir кунакъ, ce que veut dire ami il est l’usage 1° de se faire des cadeaux et puis de manger dans la maison du кунакъ. — Après cela d’après l’ancien usage de ces peuples (qui n’existe presque plus que par tradition) on devient amis à la vie et à la mort c. à d. que si je lui demande tout son argent ou sa femme ou ses armes ou tout ce qu’il a de plus précieux il doit me donner et moi aussi je ne dois rien lui refuser. — Садо m’a engagé de venir chez lui et d’être кунакъ. J’y suis allé; après m’avoir régalé à leur manière il m’a proposé de choisir dans sa maison tout ce que je voudrai: ses armes, son cheval, tout. J’ai voulu choisir ce qu’il y avait de moins cher et j’ai pris une bride de cheval monté en argent, mais il m’a dit que je l’offensais et m’a obligé de prendre une шашка qui vaut au moins 100 r arg. Son père est un homme assez riche; mais qui a son argent enterré et ne donne pas le sou à son fils. Le fils pour avoir de l’argent va voler chez l’ennemi des chevaux, des vaches quelque fois il expose 20 fois sa vie pour voler une chose qui ne vaut pas 10 r; mais ce n’est pas par cupidité qu’il le fait; mais par genre. — Le plus grand voleur est très estimé et on l’appelle джигитъ, молодецъ. —Tantôt, Sado a des 1000 r arg, tantôt pas le sou. Après ma visite chez lui je lui ai fait cadeau de la montre d’argent de N-as, et nous sommes devenus les plus grands amis du monde. — Plusieurs fois il m’a prouvé son dévouement en s’exposant à des dangers pour moi; mais ceci pour eux n’est rien — c’est devenu une habitude et un plaisir. — Quand je suis parti de Стар. Юртъ et que N-as y est resté, Sado venait chez lui tous les jours et disait qu’il ne savait que devenir sans moi et qu’il s’ennuyait terriblement. — Par une lettre je faisais savoir à N-as que mon cheval étant malade, je le priais de m’en trouver un à Стар. Юртъ. — Sado ayant appris cela n’eut rien de plus pressé, que de venir chez moi et de me donner son cheval; malgré tout ce que j’ai pu faire pour le refuser. — Après la bêtise que j’ai faite de jouer à Ст. Юртъ je n’ai plus repris les cartes en main et je faisais continuellement la morale à Sado, qui a la passion du jeu et quoique il ne connaisse pas le jeu a toujours un bonheur étonnant. — Hier soir je me suis occupé à penser à mes affaires pécuniaires, à mes dettes, je pensais comment je ferais pour les payer. —

Ayant longtems pensé à ces choses, j’ai vu, que si je ne dépense pas trop d’argent toutes mes dettes ne m’embarasseront pas et pourront petit à petit être payés dans deux ou trois ans; mais les 500 r. que je devais payer ce mois, me mettaient au désespoir.

Il m’était impossible de les payer et dans ce moment ils m’emba-rassaient beaucoup plus, que jadis les 4 milles d’Ogareff.4 — Cette bêtise d’avoir fait les dettes que j’avais en Russie et de venir en faire de nouvelles ici, me mettait au désespoir. — Le soir en faisant ma prière, j’ai prié Dieu qu’il me tire de cette désagréable position et avec beaucoup de ferveur. — «Mais comment est ce que je puis me tirer de cette affaire?» pensais-je en me couchant. «Il ne peut rien arriver qui me donne la possibilité d’acquitter cette dette». Je me représentai déjà tou[t]s les désagréments, que j’aurais à essuyer à cause de cela, какъ онъ подастъ ко взысканію, какъ по начальству отъ меня будутъ требовать отзыва, почему я не плачу и т. д. —«Помоги мнѣ Господи», сказалъ я и заснулъ. — Ce matin je reçois une lettre de N-as5 à laquelle était jointe la votre et plusieurs autres — il m’écrit: «На дняхъ быль y меня Садо, онъ выигралъ у Кноринга6 твои векселя и привезъ ихъ мнѣ. Онъ такъ былъ доволенъ этому выигрышу, такъ счастливъ и такъ много меня спрашивалъ «какъ думаешь, братъ радъ будетъ, что я это сдѣлалъ» — что я его очень за это полюбилъ. Этотъ человѣкъ дѣйствительно къ тебѣ привязанъ». —

N’est ce pas étonnant, que de voir ainsi son voeu exaucé le lendemain même. — C. à d. qu’il n’y a d’étonnant que la bonté Divine, pour un être qui l’a mérité si peu que moi. Et n’est ce pas que le trait de dévouement de Sado est admirable. — Il sais que j’ai un frère Serge qui aime les chevaux et comme je lui ai promis de le prendre en Russie quand j’y irai il m’a dit que dut-il lui en coûter 100 fois la vie il volera le meilleur cheval qu’il y aye dans les montagnes et qu il le lui amènera. —

Faites je vous prie acheter à Toula un шестиствольный писто- летъ et me l’envoyer et une коробочка съ музыкой, si cela ne coûte pas trop cher, ce sont des choses qui lui feront beaucoup de plaisir.7 —

Я все въ Тифлисѣ сижу у моря, жду погоды т. е. денегъ. Adieu chère tante, Léon vous baise mille fois les mains.

На конверте:

Ея Высокоблагородію Татьянѣ Александровнѣ Ергольской.

Въ г. Тулу.

6 января, Тифлис.

Дорогая тетенька!

Только что получил ваше письмо от 24 ноября1 и в ту же минуту отвечаю (по принятой привычке). — Недавно я вам писал, что плакал над вашим письмом и приписал эту слабость болезни. — Я ошибся: с некоторых пор я плачу над всеми вашими письмами. — Я всегда был *Лёва-рёва»; раньше я стыдился этой слабости, а теперь, думая о вас и о вашей любви к нам, у меня текут такие сладостные слезы, что я вовсе их не стыжусь. — Сегодняшнее ваше письмо очень грустно и произвело на меня то же действие. Вы всегда подавали мне советы; к несчастию, я не всегда им следовал, но я хотел бы всю жизнь жить по вашим советам; позвольте мне высказать вам впечатление, которое произвело на меня ваше письмо, и какие оно вызвало во мне мысли. — За мою привязанность к вам, вы простите мне излишнюю, может быть, откровенность. Вы говорите, что пришло ваше время отойти к тем, которых вы так горячо любили при их жизни, что вы молите бога о конце, и что жизнь ваша тяжела и одинока. Простите меня, дорогая тетенька, но мне думается, что этим вы грешите против бога и обижаете меня и нас всех, любящих вас. Вы молите себе смерти, т. е. величайшего для меня несчастия (и это не фраза; видит бог, что большего несчастия я себе не представляю, как смерть ваша и Николенькина, тех двух людей, которых я люблю больше самого себя). Ежели бог услышит вашу молитву,

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je sais que vous seriez contente de moi. Quand j’agis mal ce que je crains le plus c’est de vous faire du chagrin. — Votre amour est tout pour moi