leveґ comme un Premier-neґ,
Droit comme l’Invasion.
Tsar dresseґ parmi l’onde des nues,
Et son front se laboure.
Je te l’ai sauveґ, — a` preґsent: tue!
Et libe`re l’Amour.
Soudain quoi — a craqueґ? Le cur dur
D’un bois sec: nullement!
Mais deux mains — suivant l’eґquestre — d’une
Femme — sans — son enfant!
Cruelle aurore — aux volets s’ache`ve.
C’est mon troisie`me re ve.
Feґvrier. Deґformeґs, les chemins.
Folle neige — aux champs.
Balayeґs, tordus — les grands chemins
Par l’artel des vents.
Tantot cretes que le galop couche,
Et tantot — l’abrupt,
A talonner l’Equestre-Le-Rouge,
Ma route a son but.
Tantot la`! A porteґe de la main!
Taquin: — touche, va!
Bras absurdement tendus; devient
Neige — le cheval.
Me`ches du panache dans les yeux?
Ou saule, au virage?
Eh! les marieurs! — Ni une, ni deux…
Vents: au balayage!
Balayez, amassez les obstacles —
Plus haut que les rocs,
Que son cheval au sabot d’attaque,
Cloueґ la` — se bloque.
Les vents eґcoutent — que plainte cre`ve,
Et leur plainte cre`ve.
Il court sa course rouge sans treve,
Mon eґquestre reve.
Me`ches d’ailerons qui s’emballaient?
Ou saule, au virage?
Tenez — haut, tenez — haut les balais!
Vents: rage! A l’ouvrage!
Que voila`? Quelle butte carreґe
Emerge du sol?
Comme si la tempete cabrait
D’un coup cent coupoles.
Chasse couronneґe: enfin, la pause.
Deґja` mon front capte
Le feu des fers, deґja` dans ma paume
Le bord de la cape!
En renfort, avec glaive et tonnerre,
Le Tsar — Guerroyant!
Mais le cheval se rue et — tonnerre
Dans l’autel grondant.
J’avance et trane, telle une meute,
La troupe des vents.
Les voutes ne figent pas l’eґmeute
Des sabots sonnants.
Messe d’un mort — rond grondement monte —
Neige qui vrombit:
Le trone est renverseґ! — Vide! Monde
Sous terre — terni!
Geignez, geignez, murmurez — les murs!
Toi, neige, chahute!
L’eґcume du cheval rend obscure
L’aura des chasubles.
Titube une coupole. Oh! croulez,
Gloire et force et foi!
Et mon corps s’eґcroule, eґcarteleґ —
Les deux bras en croix.
Immense lutte d’arcs-en-ciel: tout
Lustre aura claqueґ.
Accepte-moi, toi — si pur, si doux,
Pour nous, crucifieґ.
A ta main vengeresse, on est lieґs?
Accepte le feu!
D’en haut: mais, qui sont le cavalier,
Le cheval, — les deux?
L’armure est sur lui — soleil qui brille!…
— Vol abrupt! Volons! —
La cheval — droit sur ma poitrine —
Plante son talon.
Cape de feu — aux volets s’ache`ve.
Galop de feu — treve!
Ni neige vrombissante,
Ni balayage — balai.
Ni panache emballeґ, —
Saule, au virage.
Ses me`ches grises balayeґes
Deґmarche balanceґe, — sans bec d’aigle
D’outre-nue, mais le nez fourreґ
Dans l’eґpais nuage d’un chaudron, —
Une bonne femme —
Elle a dans les mains —
Un chiffon.
Verre a` l’envers sur bouteille pas finie
On laisse — on y reviendra.
— En quoi est-ce mon reve? Et le reve dit:
Ton Ange ne t’aime pas.
Premier tonnerre sur le crane — ou coup dur
Sur le crane?! — Gens! Hola`!
Front rongeant l’oreiller sec: ce coup de dire:
Le premier: Ne t’aime pas!
N’aime pas! — Tresses de femme: nul besoin!
N’aime pas! — De bijoux rouges: nul besoin!
N’aime pas! — Mais sur le cheval — sauterai!
N’aime pas! — Sauterai — au ciel!
O esprit de mes pe`res, secouez vos chanes!
Vacillez, pins seґculaires!
Eole! O esprit de mes pe`res, mes me`ches
Doreґes, brouille-les! De l’air!
Sur le cheval blanc, au devant des guerriers
Allons, — sous la foudre des fers argenteґs!
Voyons, voyons comment se bat cet altier
Sur le Cheval-Dit-Le-Rouge!
De bon augure: le ciel s’abat!
L’aube ensanglante mon casque!
Soldats! Jusqu’au ciel — encore un pas:
Le grain crot sous la caillasse!
En avant — par dessus le fosseґ! — Tombeґs? — Un rang.
Au suivant — par dessus le fosseґ! — Tombeґs? — Encore
Au suivant — par dessus le fosseґ! — Le glaceґ blanc
Des cuirasses, qui sait: sang? Aurore?
Soldats! — Quel ennemi — enfoncer?
Dans mon sein un frisson chauffe.
Peґne`tre, peґne`tre, eґpeґe d’acier,
Un rayon — sous mon sein gauche.
Murmureґ: tu es comme je t’ai voulue!
Rumineґ: tu es comme je t’ai eґlue,
Enfant de ma passion — sur — fre`re — future
Sur le glacier — des armures!
A nul autre — jusqu’a` la fin des temps! Mienne!
Moi, les bras leve`s: Lumie`re!
— Tu resteras, a` nul autre seras, — non?
Moi, pressant sur ma plaie: Non.
Pas la Muse, non, pas la Muse,
Ni l’usure des liens
Parentaux, — ni tes filets,
O Amitieґ! — Pas une main de femme, —
une feґroce —
A serreґ sur moi le nud —
— En force.
Terrible alliance. — Moi, coucheґe dans le noir
Du fosseґ — Le Lever est si clair —!
Oh! qui m’a fixeґ ces deux ailes sans poids
A l’eґpaule —
Derrie`re?
Teґmoin muet
Des tempetes vivantes —
Coucheґe dans l’ornie`re,
Je lorgne
Les ombres.
Tant que
Vers l’azur
Ne m’emportera pas
Sur le cheval rouge —
Mon Geґnie!
Le poeme de la montagne
Liebster, Dich wundert die Rede?
Alle Scheidenden reden wie Trunkene
und nehmen gerne sich festlich…
Holderlin
Dedicace
Que tu tressailles —
Et tombent des montagnes,
Et monte — l’ame!
Laisse mon chant monter:
Chant de l’entaille,
De ma montagne.
Je ne pourrai
Ni la`, ni deґsormais
Combler l’entaille.
Laisse mon chant monter
Tout au sommet
De la montagne.
1
Cette montagne eґtait le torse
D’un conscrit renverseґ par la mitraille.
La montagne voulait des noces,
Des le`vres vierges, un ceґreґmonial.
Cette montagne — l’еxigeait.
Irruption de l’oceґan dans l’oreille,
Criant «hourra» d’un meme jet.
Cette montagne errait et guerroyait.
Montagne pareille au tonnerre.
C’est en vain qu’on joue avec les titans!
De la montagne — la dernie`re
Maison au bout du faubourg: souviens-t’en!
Des mondes — que cette montagne!
Pour le monde il prend cher, Dieu est avide.
L’entaille vint de la montagne.
La montagne eґtait par-dessus la ville.
2
Parnasse, Sinaї?
Non! Simple colline a` casernes,
Rien d’autre — feu! vas-y!
Bien qu’octobre et non mai, qu’y faire?
Cette montagne-ci
M’eґtait le paradis!
3
Paradis sur la paume offert
— Qui s’y frotte, brule entier! —
La montagne avec ses ornie`res
Deґvalait sous nos pieds.
Comme un titan avec ses pattes
De buisson et de houx,
La montagne agrippait nos basques
Et ordonnait: — debout!
Paradis — oh, nul b-a-ba,
— Courants d’air: d’air troueґs! —
La montagne nous jetait bas
Et attirait: — coucheґ!
Comment? C’est a` n’y rien comprendre:
Propulseґs, eґbahis!
La montagne eґtait consacrante
Et deґsignait: — ici…
4
Perseґphone, pour ce grain de grenade…
L’oublier en plein gel d’hiver?!
Double coquille des le`vres qui tardent,
Leur bord aux miennes — entrouvert.
Perseґphone, pour un grain deґgradeґe!
La pourpre opiniatre des le`vres,
Et tes cils — pure brisure et, doreґe,
La dent de l’eґtoile s’eґle`ve…
5
Ni erreur — que la passion, ni conte,
Et nul mentir, mais: d’un jour!
Ah! Si nous eґtions venus au monde
En terrestres de l’amour!
Ah! Si tout bonnement, d’un sens sur:
Ca? — colline! Mamelon!
(A l’attrait pour le gouffre on mesure,
Dit-on, le niveau des monts.)
Dans les touffes de bruye`re fauve,
Les souffrants lots de pins…
(… Le deґlire: au dessus du niveau
De la vie.)
— Prends, je suis tien!
Heґlas! La famille douce, ronde,
Les gazouillis qu’eux savourent…
Puisque nous sommes venus au monde
En ceґlestes de l’amour!
6
Lamentait la montagne (en terre tant reste
Ame`re l’entaille ou` saignent les ruptures),
Lamentait la montagne sur la tendresse
Tenaillante de nos matins obscurs.
Lamentait la montagne sur notre lien:
Nos le`vres: parenteґ des plus imparables!
Teґmoignait la montagne — qu’a` chacun
Il serait du selon ses larmes.
Et la montagne teґmoignait — camp tsigane,
La vie! de cur en cur qu’on brade son temps!
La montagne lamentait encore: Agar,
Il la fit partir — avec l’enfant pourtant!
Et la montagne teґmoignait — nous: jouets
Du deґmon! Nulle intention dans ses montages!
La montagne parlait, nous eґtions muets.
Nous nous en remettions a` la montagne.
7
Lamentait la montagne — rien que tristesse
Resterait du sang et brasier qui sont notres.
Teґmoignait la montagne: elle ne nous laisse-
Rait pas, ne t’admettrait pas avec une autre.
Lamentait la montagne — rien que fumeґe
Resterait de nos citeґs et au-dela`.
Teґmoignait la montagne — nous: destineґs
Aux autres (je n’envie pas ces autres-la`!).
Lamentait la montagne — d’un poids affreux,
Le serment qu’il est trop tard que nous reniions.
Teґmoignait la montagne — vieux est le nud
Gordien — devoir et passion.
Lamentait la montagne sur notre entaille —
Demain! Attends! Quand au-dessus de nos fronts
Non la mort, — seul memento: la mer eґtale!
Demain, quand nous comprendrons.
Un bruit… Comme si quelqu’un tout simplement —
Eh bien…. pleurait tout pre`s?
Lamentait la montagne, seґpareґment
Descendre il nous faudrait
Dans la vie dont nous savons bien tous: bohe`me,
Boue, bazar, et caetera…
Teґmoignait encore que tous les poe`mes
Des montagnes
s’eґcrivent
comme ca.
8
Cette montagne eґtait la bosse
D’Atlas, — titan geґmissant qui tient bon.
La montagne fera la force
De la ville ou` de`s l’aube nous battons
Nos vies comme cartes jeteґes!
— Passionneґs, obstineґs a` ne pas etre.
Ainsi que l’ours pour l’apreteґ
De son cri, ainsi que les douze apotres
Reґveґrez mon ingrate grotte.
(Grotte — j’eґtais, ou` les vagues s’engouffrent!)
De ce jeu la dernie`re porte,
T’en souviens-tu — tout au bout du faubourg?
Des mondes — que cette montagne!
Les dieux se vengent de leurs simulacres.
L’entaille vint de la montagne.
La montagne eґtait sur moi seґpulcrale.
9
Passeront les anneґes, la pierre sus-dite
En plate sera changeґe, oteґe.
Alors notre montagne sera construite
De pavillons, d’enclos — grignoteґe.
On dit qu’en bordure, sur de tels coteaux
L’air est plus pur et qu’il fait bon vivre.
Et l’on se mettra a` tailler des lambeaux,
A rayer de linteaux l’herbe vive,
A niveler mes cols et tous mes ravins —
A l’envers! Car il faut qu’un soupcon
De maison entre dans le bonheur d’au moins
Quelqu’un, — de bonheur — dans la maison!
De bonheur, — dans la maison, d’amour deґnueґ
De fiction et de tension des veines!
C’est qu’il faut etre femme et le supporter!
(Il fut bel et bien, quand tu venais,
Le bonheur — dans la maison!) D’amour tranquille,
Sans que rupture et couteau s’imposent.
Des ruines de notre bonheur une ville
Se le`vera — d’eґpoux et d’eґpouses.
Et au bon air dans cette meme nature
— Si tu peux — faute! Tant qu’il est tot! —
Les boutiquiers pourront en villeґgiature
Macher et remacher leur magot.
Et d’inventer des couloirs courbes ou droits
Pour que, brin a` brin, la maison — fut!
Car il faut bien qu’au moins quelqu’un ait un toit
Et un nid de cigogne au-dessus.
10
Jamais la montagne n’oubliera — le jeu
Sous le poids de pareils fondements.
Se perdre — on le peut, — la meґmoire: on ne peut:
La montagne a montagnes de temps!
Et ils comprendront! Que leurs yeux s’eґcarquillent
Devant les crevasses obstineґes:
Non pas monticule planteґ de familles, —
Mais crate`re qu’on a deґclencheґ!
On n’immobilisera pas le Veґsuve
Par des vignes! Avec du lin on
Ne tiendra pas un geґant! La folle eґtuve
Des le`vres suffit afin qu’en lion
Les vignes changeґes, se retournent soudain,
Crachant sur vous des laves de haine.
Vos filles seront rien moins que des putains
Et vos fils eґcriront des poe`mes!
Fille, eґle`ve un enfant naturel! Dehors,
Fils! Livre-toi aux femmes du vent!
Il ne vous sera pas donneґ, vous — les corps,
De seґjour de plaisir sur mon sang!
Plus dur que la